A propos des notions extrêmes de commencement
et de fin :
Stance
11,1. On ne discerne pas de limite ab ante, a dit le grand anachorète.
La transmigration (samsara) est, en vérité, sans
début ni terme, elle n'a ni commencement ni fin.
"Les
catégories temporelles (antériorité, postérité,
simultanéité) s'appliquent dans le monde, non pas au monde.
Il n'y a pas de fin de la transmigration, il y a une fin à
la transmigration, quand on cesse de penser l'existence en transit selon l'avant
et l'après, quand disparaît de l'esprit le couple «commencement/fin,
naissance/vieillissement et mort».
Définition
du Nyaya-kosa (lexique hindou du XIXe
siècle), article samsara : «Une chose qui a pour effet
et pour cause la souffrance et ce qui s'ensuit. Est sans commencement.
S'origine dans la détermination du temps selon l'avant et l'après.»"
Stances
du milieu par excellence, Nagarjuna, Guy Bugault, 2002
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A propos de l'idée d'être en soi :
Stance
15,7. Dans son Avertissement à Katyayana le Bienheureux, lui
qui sait ce que veut dire existence, non existence, a récusé
l'un comme l'autre de ces deux énoncés : dire «il y a»,
dire «il n'y a pas».
"Il
y est dit notamment : «Celui qui observe avec un jugement droit le surgissement
des choses comme il se produit, à celui-là la notion de l'inexistence
ne vient pas à l'esprit. Kaccayana, celui qui observe avec un jugement
droit la destruction des choses comme elle se produit, à celui-là
la notion de l'existence vient pas à l'esprit.»
Ce que le Buddha enseigne à Katyayana est donc tout sauf un point
de détail, c'est le bouddhisme même en tant que voie du milieu
(madyama pratipad) entre les deux extrêmes que sont l'existence
et la non-existence. Le Samadhiraja 103, 10, va jusqu'à
dire : «L'homme avisé ne se tient même plus au milieu»,
car à ses yeux les extrêmes (anta) ont disparu."
Stances
du milieu par excellence, Nagarjuna, Guy Bugault, 2002
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A
propos du lien et de la délivrance :
Stance
16,10. Du moment qu'on ne peut ni ajouter le nirvana à quoi
que ce soit, ni supprimer le samsara, quelle idée reste-t-il,
en propre, du samsara, quelle idée du nirvana ?
"Candrakirti
précise que cette stance est à entendre du point de vue de la
vérité de sens ultime.
Surimposer le nirvana est impossible parce qu'il est hors de toute prise,
insaisissable, indiscernable (anupalabhyamanavat). Mais arrêter
complètement le samsara, le flux existentiel, est également
impossible car un flux à l'arrêt n'est plus un flux. Quelle idée
reste-t-il donc d'un samsara auquel on voudrait mettre fin (ksayartham)
? Quelle idée d'un nirvana qui serait l'objet d'une acquisition (praptyartham),
ou d'une transaction (vyavahara) ?
(...) L'extinction est avant tout l'extinction du couple possesseur-possédé.
C'est une dépossession.
(...) Ce sont nos méprises qui nous attachent : notamment prendre pour
permanent ce qui est impermanent, pour bien-être ce qui est mal-être,
pour pur ce qui est impur, pour soi ce qui n'est pas soi. Prendre connaissance
de nos méprises, c'est cela la délivrance. Elle ne consiste
pas dans un événement du monde objectif, elle est affaire de
lucidité, d'éveil. Personne n'est lié, personne n'est
libéré. Car lorsque la compréhension est parfaite (parijananti,
Pr. 301,1), son objet s'évanouit."
Stances
du milieu par excellence, Nagarjuna, Guy Bugault, 2002
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A propos de l'enseignement adapté au développement
de la personne :
Stance
18,8. Tout est bien comme il semble, rien comme il semble. A la fois comme
il semble et non comme il semble. Ni l'un ni l'autre. Tel est l'enseignement
progressif (anusasana) des Buddha.
"anusasana
: enseignement graduel et adapté à la compréhension de
l'auditeur.
(...) Cet aspect
graduel de l'enseignement est présent dès le Canon pali sous
le nom d'anupubbi katha. C'est donc un trait constant de la pédagogie
bouddhique.
Il faut rappeler un autre texte de Nagarjuna, destiné aux rois, où
sont distingués cinq degrés de l'enseignement. «De même
que le grammairien récite l'alphabet, de même le Bouddha a prêché
la Loi aux gens à convertir d'après leur capacité [à
comprendre]. Aux uns il a prêché la Loi pour les éloigner
du mal. A d'autres pour réaliser le bien ; à d'autres dans ces
deux buts. A d'autres encore l'embryon de la vacuité et de la compassion
qui est profond et terrifiant, et sans rapport avec ces deux buts. A d'autres
enfin le moyen d'obtenir l'Eveil.» (Ratnavali, IV, 94-96)."
Stances
du milieu par excellence, Nagarjuna, Guy Bugault, 2002
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A propos du complexe des causes et conditions
:
Stance 20,24.
Le fruit n'est pas produit par le complexe. Il n'est pas non plus produit
par ce qui n'est pas le complexe. En l'absence de fruit, que reste-t-il du
complexe de causes et conditions ?
"La relation
cause-effet est impensable pour qui croit aux «choses», (bhava),
c'est-à-dire à des entités séparées.
En effet : comment produire une cruche qui existe sur la table. Même
si notre imagination institue subrepticement une sorte de fondu-enchaîné
entre ces pseudo-entités, mieux vaut, d'entrée, ne pas poser
ces entités. C'est ce que fait la doctrine de la coproduction conditionnée
(pratitya-samutpada), qui conçoit le cours des choses sur le
mode d'un fondu enchaîné.
Application à la voie bouddhique : le nirvana ne s'obtient pas.
Il n'y a pas de relation de cause à effet (comme dans une recette)
entre l'accumulation pourtant nécessaire des mérites et l'extinction-Eveil.
Candrakirti cite l'Upalipariprccha (éd. Python p. 62-63) : «Si
vous entrez en religion après avoir abandonné la vie de famille,
vous obtiendrez tous les fruits. Et quand vous aurez pesé ce qui appartient
en propre à toutes choses, vous obtiendrez aussi les fruits de tous
les fruits. Pour ceux qui de cette façon n'obtiennent ni fruit ni obtention,
une merveille se produit.»"
Stances
du milieu par excellence, Nagarjuna, Guy Bugault, 2002
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